Le héros méconnu qui transporte les femmes atteintes de fistule à l’Hôpital de la Mission de Kitovu

Lors de l’évaluation de la contribution des équipes de la fistule à la prestation de services de prévention et de traitement dans les hôpitaux, on a généralement tendance à se concentrer sur ceux qui sont impliqués dans la la prestation directe de service. Les chirurgiens de la fistule, les infirmières, les conseillers et le personnel des salles d’opération entre autres sont essentiels, et pourtant d’autres membres du personnel de soutien sont impliqués dans des tâches en rapport avec la finance, l’approvisionnement, la logistique, le transport et le bien-être des clients et jouent un rôle fondamental dans la restauration de la dignité des femmes affectées par la fistule obstétricale.

Francis Kironde fait partie de ce personnel de soutien qui est véritablement passionné par son travail. Depuis 24 ans, il transporte les femmes souffrant de fistule obstétricale de localités lointaines vers l’Hôpital de la Mission de Kitovu pour qu’elles aient accès à des services de traitement gratuits.  Francis n’a jamais voulu être chauffeur; lorsqu’il était jeune, il rêvait de dévenir médecin. Mais son rêve a été brisé en 1991 lorsque ses parents n’ont plus été en mesure de payer ses frais de scolarité.  Un an plus tard, il a présenté sa candidateure et a commencé à travailler en tant que chauffeur à l’Hôpital de la Mission de Kitovu à Masaka, en Ouganda.

Francis Kironde transporte les femmes à l'Hôpital de la Mission de Kitovu depuis 24 ans.
Francis Kironde transporte les femmes à l’Hôpital de la Mission de Kitovu depuis 24 ans.

Francis évalue à plus de 2000, le nombre de femmes qu’il a transportées et qui souhaitaient avoir accès aux services de traitement de la fistule dans l’établissement. Il explique que la localité la plus éloignée où il s’est rendu pour aller chercher des femmes atteintes de fistule se trouve à 458 km dans la localité de Gulu, dans le nord de l’Ouganda. Francis précise qu’avant de commencer à travailler à l’hôpital, il n’avait jamais entendu parler de la fistule obstétricale ou vu une femme qui souffrait de cette maladie. Pendant sa première année de travail, un des chirurgiens invités lui a expliqué les causes de la fistule, les mesures de prévention et les opportunités de traitement, ce qui l’a aidé à comprendre la situation des femmes qui vivent avec la fistule. Il affirme qu’en dépit de la mauvaise odeur d’urine qui le submerge en général lorsqu’il transporte ces femmes, il ne les stigmatise pas.

« Chaque fois que je transporte ces femmes, je fais au mieux pour leur montrer que je ne suis pas incommodé par l’odeur d’urine car je sais que ce n’est pas de leur faute….. »

Lorsqu’on lui demande ce que il aime le plus de ce travail, il répond qu’il tire une grande satisfaction de voir les femmes qui avait perdu espoir retrouver le sourire et jubiler après le traitement de la fistule. Il poursuit et dit que lorsqu’il transporte les femmes à Kitovu pour le traitement, l’humeur est généralement sombre dans le véhicule. Tout change pendant le trajet retour vers leur domicile.

« Pendant le transport de ces femmes vers leur communauté après le traitement, elles sont tout sourire, pleines de vie et parfois, elles chantent et jubilent tout au long du trajet qui les conduit chez elles. » 

Francis transporte également les agents de santé vers différentes destinations pendant les campagnes de sensibilisation communautaire sur la fistule obstétricale et d’autres problèmes de santé maternelle. En s’appuyant sur son expérience, ses connaissances et sa passion pour la santé des femmes, il participe également à la sensibilisation de ses semblables quant à la nécessité de soutenir leurs partenaires et d’accéder à un large éventail de services de santé maternelle. Il affirme que le travail avec l’Hôpital de la Mission de Kitovu l’a également aidé à davantage comprendre son épouse et à s’impliquer pleinement dans l’éducation de leurs quatre enfants.

 

Simon Ndizeye est Chargé de Suivi & Évaluation auprès du projet Fistula Care Plus en Ouganda.  Il a 11 ans d’expérience en matière de recherches, suivi et évaluation des programmes de VIH/SIDA, de santé reproductive, de planification familiale, et de santé maternelle, néonatale et infantile avec une concentration sur la prestation de service et la communication sur le changement comportemental en Afrique subsaharienne. Simon est titulaire d’un diplôme de troisième cycle en suivi et évaluation du Management Institute de l’Ouganda et d’un master en population et santé reproductive de Makerere University.