De la recherche à l’action : Intervention pour réduire les obstacles liés à l’accès au traitement de la fistule au Nigeria et en Ouganda

Par Elly Arnoff, Associé au Programme – Evaluation et Recherche, EngenderHealth

Les femmes souffrant de fistule font souvent partie des personnes les plus démunies et marginalisés de la société. La fistule obstétricale est causée par une rupture entre le vagin et la vessie et/ou le rectum lorsqu’une femme a un travail prolongé ou une dystocie pendant l’accouchement et n’a pas accès aux soins obstétricaux d’urgence en temps opportun. Par la suite, le nourrisson est souvent mort-né laissant la femme incontinente, c’est-à-dire, une fuite chronique d’urine et/ou d’excréments. Dans plusieurs régions, les femmes souffrant de fistule sont également rejetées par leur famille, leurs amis et leurs communautés, toujours marginalisées aggravant ainsi les obstacles existants quant à l’accès aux soins et aux services de traitement. Ces obstacles liés à l’accès à la réparation de la fistule doivent être abordés de manière holistique et intégrée afin qu’un plus grand nombre de femmes puissent vivre sans fistule. Grâce à une approche de recherche à l’action, le Projet Fistula Care Plus (FC+) à EngenderHealth élimine les obstacles liés à la prévention et au traitement de la fistule aux niveaux de la communauté et des prestataires!

En 2014, FC+ a collaboré avec le « Population Council » (Conseil de la Population) pour faire une analyse documentaire sur les obstacles entravant l’accès des femmes aux services de fistule dans les pays à faible revenu. L’étude a identifié de nombreux obstacles auxquels les femmes sont souvent confrontées et les classent comme des facteurs psychosociaux, culturels, de sensibilisation, sociaux, financiers, liés au transport, au manque de structures sanitaires  et à la qualité de soins. En s’appuyant sur cela, le projet FC+ et Population Council ont mené des recherches qualitatives et formatives en 2015 pour mieux comprendre les obstacles spécifiques rencontrés au Nigeria et en Ouganda et identifier les facteurs favorables pouvant atténuer les obstacle les plus importants. À travers des entrevues et des discussions de groupes avec des femmes souffrant de fistule, des membres de la famille et des intervenants de la communauté, l’étude a révélé qu’au sein des communautés, il y avait un manque considérable de compréhension concernant la façon dont la fistule survient. Une cliente de fistule en Ouganda raconte ce qui suit :

« Il a fallu environ deux mois pour constater cette maladie parce que je n’avais jamais entendu parler de cela et qu’elle pourrait arriver à une personne. »

Parmi les prestataires de soins primaires, il y avait également un manque important de connaissances sur l’accès au traitement de la fistule. En outre, l’on a  indiqué que le coût du transport pour les femmes à la recherche de services était une contrainte majeure. Une cliente de la fistule au Nigeria explique :

« Ce n’était que le manque d’argent qui m’empêchait d’aller me faire traiter pendant huit ans. Nous cherchions un traitement traditionnel en raison du manque d’argent pour venir ici … oui, pas d’argent pour venir ici. Mon mari n’en avait pas, et son père également, il a fallu que mon père vende quelque chose pour nous permettre de venir ici.

Les résultats de ces études ont permis de rendre disponible une information complète, un dépistage et une intervention pour la référence visant à réduire les obstacles liés à la sensibilisation, les finances et le transport qui entravent l’accès des femmes au traitement de la fistule au Nigeria et en Ouganda. L’intervention utilise une question pour le dépistage de la fistule, un bon de transport pour permettre aux femmes sélectionnées positivement de se diriger vers et revenir de la structure de traitement de la fistule gratuitement, et avoir de multiples canaux de communication pour la messagerie, le dépistage et la référence pour la fistule. Les prestataires de soins de santé primaires (médecins, sages-femmes, infirmières et travailleurs communautaires de la santé), qui sont souvent le premier point de contact pour les femmes souffrant d’incontinence liées à la fistule, seront formés pour identifier les clientes potentielles souffrant de fistule pour la référence et pour faciliter le transport gratuit à des structures de traitement appropriées. Au niveau communautaire, les agents de proximité diffuseront des messages ciblés sur les symptômes de la fistule et les services de traitement disponibles ; et un service gratuit d’assistance téléphonique, qui sera largement annoncé par des agents communautaires, des messages radio et à travers des dépliants, dépistera les femmes souffrant la fistule via leur appareil mobile en utilisant la technologie de réponse vocale interactive. Les femmes sélectionnées positivement à partir de chacune des chaînes recevront un bon de transport gratuit à destination et en provenance de la structure de traitement de la fistule ainsi que du soutien pour la gestion des cas soit par l’agent communautaire soit par le prestataire de soins de santé primaires.

L’intervention est menée par FC+ dans deux sites au Nigeria et un site en Ouganda. Population Council effectue une troisième phase de recherche sur la mise en œuvre pour évaluer les effets de cette intervention. Lors du Quatrième symposium mondial sur la recherche sur les systèmes de santé à Vancouver, au Canada, le Directeur adjoint de FC+ d’EngenderHealth, le Dr Vandana Tripathi, a présenté cette initiative de recherche sur les obstacles lors d’une session intitulée : « Comment s’y rendre : travailler au seins des systèmes de santé existants pour surmonter les obstacles liés aux soins de santé maternelle et de la reproduction. » Le panel comprenait des conférenciers du Population Council, Johns Hopkins School of Public Health et London School of Hygiene and Tropical Medicin. Ils ont examiné de manière générale comment les obstacles sociaux, culturels, économiques, politiques, sexospécifiques et de confiance peuvent être surmontés dans le domaine des soins de santé maternelle et de la reproduction dans les pays africains, tels que le Kenya, le Nigéria, le Swaziland et l’Ouganda, et les pays d’Asie du Sud, comme le Bangladesh, l’Inde et le Pakistan.